9 septembre 2011

La Piel Que Habito

La Piel que Habito
Pedro Almodovar
2011
Adaptaton libre de Mygale de Thierry Jonquet
En salle actuellement




Critique commune

L'avis de Mathilde


La recette d'un bon film d'Almodovar
Les ingrédients classiques :
-Quelques acteurs avec qui il a déjà travaillé (Antonio Banderas, Elena Anaya et Marisa Paredes entre autres)
-Un univers médical, avec les maladies, blessures, troubles psychiques omniprésents (comme plus tôt dans Tout sur ma mère, Etreintes Brisées, Parle avec elle)
-Une histoire d'identité sexuelle
-Un drame
-Une histoire familiale compliquée
-Une Bande Son à couper le souffle, qui maintient le suspens, amène l'angoisse à son paroxysme
-Beaucoup de passion, accompagnée d'un soupçon de désir

Les ingrédients spécifiques :
-Une bonne dose d'angoisse
-Un peu de claustrophobie
-Glandes lacrymales fonctionnelles
-Instinct de survie

Ustensiles:
-Quelques scalpels
-Un revolver
-Une combinaison Jean Paul Gaultier

Recette:
Allumez la musique à une température d'environ 80 décibels, préparez votre mouchoir. Dans un bon scénario, mélangez tout, séparez la substance obtenue en trois parties. Maintenant, Avant, Après. Et voilà.
Ça vous paraît simple. Mais détrompez vous seul un grand cinéaste est capable de vous cuisiner autant mentalement et moralement. Le film qu'Almodovar nous sert cette fois ci n'est pas un de ses classiques et pourtant on reconnaît la signature du grand chef. Pour que La piel que habito ressemble à ce à quoi vous vous attendiez en entendant le nom du réalisateur, il faudrait y ajouter le folklore de Talons Aiguilles et l'humour de Femmes au bord de la crise de nerf. Car c'est à peine un seul et unique sourire que le film réussit à nous arracher. On avait déjà connu la tristesse de Étreintes Brisées, Volver ou Tout sur ma mère, mais rien ne nous préparait à un thriller oppressant.
Robert Ledgard est un chirurgien esthétique, un chercheur, un fou, un tortionnaire. Après le suicide de sa femme mutilée par une brulure et de sa fille mutilée par un jeune drogué, il décide de créer une peau résistante à toute forme de dégradation. Il transgresse tous les codes de la médecine, utilise la transgenèse, un cobaye humain et oublie toute forme de morale. Aucun regret, aucune méfiance.
Il prend sa revanche sur la vie en transformant celle d'un autre jusqu'à ce que la passion, le désir et une promesse brisée le perde. "Te menti". Je t'ai menti. Syndrome de Stockholm impossible.
Bouleversant. Comment passer à coté d'un tel film. Et pourtant...L'ambiance est radicale, parfois perverse. Est ce nous ou le personnage qui sommes surveillés, enfermés, prisonniers de notre propre peau?
La peau justement. La piel. Organe qui nous sépare, qui nous protège, qui nous éloigne des autres. Almodovar lui même est distant. Et pourtant dans chaque plan, chaque reflet on l'aperçoit. On le reconnaît lorsque soudain, la chanteuse d'un mariage interprète Por el amor de amar et que les larmes coulent. La grâce d'Elena Anaya et la voix d'Antonio Banderas font le reste. Les deux sont étonnants et si...parfaits.


L'avis de Léa


Surtout, ne pas oublier de respirer. Dès le début du film, on pressent le côté gênant et glaçant des images, plongée vertigineuse dans ce milieu aseptisé et clinique. Pas le moindre soupçon d'honnêteté ou de confiance entre les personnages, tout n'est que faux-semblants, mensonges et trahisons...
Antonio Banderas joue le rôle d'un chirurgien esthétique dérangé et sans pitié. Au fur et à mesure que le film avance on prend conscience de cette folie, mais jusqu'où est-il prêt à aller afin d'assouvir ses désirs les plus tordus ? La réponse est déjà là, devant nous. Et surtout dans le passé. Almodovar jongle entre passé et présent avec brio, manie superbement le temps, pour parfois nous perdre. Mais on s'y retrouve toujours, enfin presque...
Après avoir perdu sa femme et sa fille, et pour oublier la mort qui rôde autour de lui, le chirurgien prend la décision de créer une peau capable de résister à toute épreuve. Une peau invincible, en quelque sorte, pour défier la mort, et accomplir une vengeance personnelle. Tout son travail de culture des cellules de peau se base sur une absence totale de scrupules, il bafoue aveuglément les règles de la médecine, et ne tient compte d'aucune éthique, car il n'hésite pas à tester cette nouvelle peau sur un être humain... Mais sa propre innovation va finir par l'abattre, il devient fou, il l'est déjà, ils le deviennent finalement tous. Tous les acteurs sont magnétiques et terrifiants à la fois, attirants mais pourtant si froids... Les images, d'une beauté plastique, transmettent toutes les émotions possibles. Almodovar a ses obsessions, qui sont toujours aussi présentes. Il nous interroge, nous met devant notre propre existence. Elena Anaya, la "patiente", écrit sur les murs de sa chambre les jours qui passent, puis tous ces petits signes noirs finissent par recouvrir les murs : c'est nous qui sommes enfermés, enfermés à l'intérieur de nous-mêmes. Le film est assez différent de ses autres Å“uvres, mais on décèle tout de même cette virtuosité qui caractérise tellement le réalisateur... Anticonformisme et originalité sont également des éléments majeurs de ses films, on les retrouve bien ici. Soyez-en sûrs, vous n'en ressortirez pas indemne.

 A voir : Tout sur ma mère, Étreintes Brisées, Parle avec elle, Femmes au bord de la crise de nerf, Talons Aiguilles, Volver

A écouter : 
Particulièrement Shades of marble de Trentmoller 
Mais TOUTE la BO est Géniale!!!

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