25 avril 2013

Playme - Interview


Un mois après la sortie de leur EP Draw The Line, ils joueront demain et après demain sur la scène du Berry au Printemps de Bourges. On était à leur Release Party à La Marquise le 29 mars et une semaine avant, on les interviewait dans leur studio.


Doucement mais sûrement, l'electro rock envahit nos radios, nos oreilles. Les grands s'y mettent : Muse, The Strokes ; Daft Punk y reste... Playme y plonge.
« Au niveau artistique, le rock avec ses instruments à l'ancienne, ça fait 40-50ans qu'il y a des mecs qui bossent dessus, donc presque tout a été trouvé. L'avantage de l'electro c'est que c'est encore assez récent, il y a énormément d'évolutions au niveau des technologies et des instruments donc on peut vraiment arriver avec un son frais et nouveau. Ce qu'on entend à la radio, c'est très surproduit alors quand tu as un groupe de rock traditionnel après, ça fait bizarre, on dirait qu'il manque une couche d'arrangements, ce qui est facile à faire quand tu investis dans des machines, les gens s'y retrouvent plus quand ils entendent ce qu'ils ont l'habitude d'écouter à la radio. C'est un gros pari à l'heure actuelle de faire du rock pur parce que ça marche pas vraiment en France, c'est difficile de percer. Nous on aime l'electro, donc on y va naturellement, mais après, même pour vendre soit tu fais de l'electro soit de la chanson française avec une guitare folk... Enfin il faut se dépêcher il y a Daft Punk qui ressort un album ! »
Playme s'est formé en 2011 « pour le fun », « le concept c'était de faire un concert de reprises pour une soirée étudiante, on a bien sympathisé, on a commencé à réfléchir à un projet, on a fait stock de 10-12 compos qui ont alimenté pendant un an un set d'une heure » sur des tremplins, aux 24h de l'INSA, sur la scène du Crédit Mutuel au Printemps de Bourges ou dans des petites salles. «  Il y a deux ans on était jeunes en tant que projet, en tant que groupe, on savait pas où on allait et quelle direction artistique donner au projet « on est des potes, on fait de la musique, c'est marrant, tu plaques un accord c'est super », maintenant c'est différent... »

Après six mois d'enfermement après le boulot, de 20h à 2h du mat', 5 jours sur 7, Playme a sorti son premier EP il y a un mois. On en retient une belle énergie. Une basse et une batterie très rock. Le reste plus electro. La fusion n'est pas encore totale, on remarque souvent dans les morceaux deux parties distinctes : des débuts pop-rock et des fins qui s'étirent en sons plus artificiels issus de machines aux boutons fluo clignotants (Lights Out, DTL). Influencés par les débuts de Muse, Draw the Line fait plus penser aux derniers albums du trio britannique.
A la Marquise le groupe enchaîne son set. Précis, cohérents, on remarque une belle hégémonie sur scène, sans exubérance, sans timidité non plus. Le risque de l'electro statique en concert est dépassé. « On fait de l'electro en temps réel, sur scène on est en direct. » Les machines sont là, mais discrètes. C'est sur scène et non dans les versions studio qu'on remarque la maîtrise de la voix.
« On est d'abord un groupe de live, on aime montrer l'énergie et la puissance, retourner les tripes des gens par l'harmonie ET par les riffs. L'objectif est de faire bouger les gens. Ce qu'on aimerait faire c'est animer une soirée pour les jeunes, parce que pour écouter du rock en ce moment il n'y a personne aux petits concerts...à la marquise par exemple, mais par contre tu vas à côté, à l'Ayers Boat, c'est plein. Bon ils écoutent de la dubstep, mais au moins ils dansent.
Nous notre objectif c'est de faire de la musique qui puisse plaire aux jeunes dans une boîte, faire un son plus moderne, un truc sur lequel tu peux danser à deux heures du mat'. On aimerait entendre notre musique en boite de nuit, Playme c'est le jukebox, tu appuies sur play et tu entends pleins de styles de musique différents, c'est ce qu'on essaye de faire.
Draw the line, ça ne veut pas dire « trace la ligne », c'est « fais la part des choses », ça correspond à la vision qu'on a du projet, on vient d'un univers rock et on veut faire un truc plus electro, faire la part des choses entre deux univers, pour n'en faire qu'un seul au final. »

Et la scène, ce n'est pas fini. Comme après toute sortie d'EP qui se respecte, la prochaine étape avant l'enregistrement de l'album (fin 2013, sortie 2014), c'est le live. Playme retourne au Printemps de Bourges les 26 et 27 avril. Sélectionnés au tremplin du 10 avril pour jouer sur la scène Pression Live des 24h de l'INSA (selon eux, lors de l'interview ce n'était « pas gagné »...et bien si!), ils sont programmés pour la soirée du samedi 18 mai en compagnie de Deluxe, The Supermen Lovers, The Architect et Yalta Club.

Brice (guitare, chant, piano, machines) et Martin (basse, machines, back vocals) que l'on a rencontré sont issus d'univers musicaux assez éloignés de leur style : formation classique et jazz au conservatoire, solfège, harmonie : « C'est pleins de connaissances assez utile même...et surtout quand tu fais de l'electro, ça permet de donner une couleur particulière ! »
Mais lorsqu'on aborde la fameuse question des influences, on retrouve l'univers de Playme : Rage Against The Machine, « pour le concept du rock dans ta gueule », Phoenix pour le côté français, Housse de Racket, Skip The Use, Shaka Ponk pour le live, Muse évidemment : « Ça reste de la très bonne musique même si leur grandiloquence est critiquable. C'est plus trop du rock, c'est du stadium rock, les compos sont trop conçues pour des scènes immenses. », Daft Punk pour le côté hybride rock-electro « Quand tu écoutes leurs mélodies, c'est du rock avec des instruments electro, c'est conçu et composé comme du rock, les batteries sont énormes mais c'est pas des gros beats» mais aussi Nasser : « Ils font plus ou moins ce qu'on voudrait faire, eux c'est plus brutal, c'est du rock electro boîte de nuit, à minuit-une heure du mat', tout le monde danse ! ».

Lights out est de loin la plus dansante de l'EP, la seconde place est attribuée à la plus calme mais non moins groovy A Hard-nosed woman (la femme intraitable).
« Lights out, c'est une chanson un peu épileptique : le morceau grossit jusqu'au point culminant. Moi ça me faisait penser à des couleurs qui virevoltent autour de toi, ça m'a fait penser à un voyage que j'avais fait à Tokyo : tu es au milieu de plein de monde, tu comprends rien, mais tu as l'impression d'être tout seul. » (Martin)
-J'avais la même image, en fait on s'est rencontré en cours de japonais... » (Brice)
-La différence c'est que je parle bien et lui non (rires). »
Après une suite de digressions en japonais (qui m'ont laissée, il faut l'avouer, assez perplexe et très impressionnée), on continue à parler paroles... A la première écoute, on se rend très vite compte que l'objectif principal n'est pas de faire passer un message. Du moins pas à travers les paroles mais grâce à la musique. On saisit quelques bouts de phrases, quelques mots d'anglais...
« On cherche pas à raconter des histoires, surtout pas des histoires politiques, on cherche quelque chose de joli dans la forme, dans la musique...accompagné de paroles. L'anglais est intentionnel, aujourd'hui en France, si tu fais une chanson super avec des paroles en français, l'auditeur lambda va écouter d'abord les paroles et la musique va passer à côté. Si les paroles ne sont pas bien écrites, c'est radical... Nous on ne veut pas que les parole passent avant la musique. »

Dialogue final (paroles, projets, passion):
« C'est assez amusant d'écrire les paroles, au moment d'écrire les lignes de chant, Brice se retrouve à chanter du yaourt en anglais, « je veux une phrase de 7syllabes qui finit par [ey] ». Euh... ok. (Martin)
-Les [i] en anglais c'est horrible... (Brice)
-L'anglais c'est plus libre comme langue, comme sonorités, si tu prononces bien l'anglais c'est que tu n'articules pas (rires) ! Radiohead par exemple, quand tu écoutes Thom Yorke tu te dis « mais qu'est ce qu'il bave ?! »... 
-C'est l'exemple typique pour nous au niveau influence pour les paroles : on comprend rien mais quand on y regarde de plus près c'est bien écrit, très imagé, c'est intéressant !
- La dominante c'est la musique, on fait de la musique pour la musique ! La cerise sur le gâteau c'est de faire des paroles qui sont cohérentes avec la musique, on veut pas du "I love you machin chose". Je m'inspire aussi de ma vie personnelle pour écrire, d'images, de couleurs. 
Paint, une chanson qui n'est pas dans l'EP mais qu'on joue sur scène c'est un peu notre histoire. On est tous les deux issus d'une grande école d'ingénieur en mode...chiant. Au bout d'un moment tu te dis « j'ai fait quoi dans ma vie? ». T'étais bon à l'école, tu te retrouves sur les rails, en prépa, en école, tout ça pour se retrouver à 35ans avec le rêve américain : la femme, les enfants, un chien et un scénic, ça me faisait déprimer...
-Paint by numbers c'est un jeu pour gamin, tu as un dessin divisé en parties et chaque partie a un numéro qui correspond à une couleur, et quand tu colories ça te fait le dessin final.
-En gros tu dois colorier les bonnes cases avec les bonnes couleurs. C'est un piège : « Hey petit enfant, tu es créatif alors qu'en fait, tu n'as rien fait du tout » donc ça faisait un parallèle avec ma vie personnelle. Après les paroles sont imagées, c'est abstrait. Le concept du 35ans, scénic et chien c'est la solution facile, on se pose pas de questions, tu sais qu'à la fin du mois le chèque tombe mais au final...ça donne pas envie
-Du coup on a besoin de ça, du groupe, on y est tout le temps, on est claqués mais on vit un truc sympa, moi je ne pourrai pas vivre sans ce petit truc à côté, qui te fait vivre. On a investi dedans donc on va essayer d'emmener ça loin. Après à l'heure actuelle c'est avant tout une passion c'est pas un moyen de gagner de l'argent, c'est un moyen de vivre un truc cool, sur scène. 
Ça fait 8mois qu'on essaye de faire de l'electro...qu'on geek dessus comme des porcs, on compose différemment depuis...
On fait de la compo en live maintenant, avant on remaniais mes compos (Brice) ou alors on se prenait la tête devant le pc.
-On cherche l'énergie !
-Ça nous permet de trouver une symbiose directement ! »

Les questions traditionnelles Our Degeneration

La dernière chanson que vous avez écoutée ?
Martin : Retrosexual de Nasser
Brice : Nasser aussi, Come on... Ah j'ai écouté les Salmon Fishers hier aussi !!!

Le dernier album que vous avec acheté ou téléchargé (illégalement ou pas) ?
Martin : Straightener, un groupe de rock japonais en bien...pas manga ! Ça lorgne un peu vers le hip hop alternatif.
Brice : Muse, le dernier...ou Orelsan, ça a été le même syndrome que Housse de racket, en studio j'aimais pas du tout et en live j'étais sur le cul !
Martin : C'est du rap hybride, on peut presque le citer comme influence, il y a des sons qui viennent de l'espace, un côté electro, il a vraiment un groupe sur scène, il est dément...c'est du rap du futur !
Brice : Ça prend aux tripes !

Le dernier film que vous avez vu ?
Brice : Cloud Atlas de Andy et Lana Wachowski, je l'ai trouvé moyen...
Martin : The Murderer (The Yellow sea) de Na Hong Jin, un thriller coréen.

Le dernier livre que vous avez lu ?
Brice : Les cerfs-volants de Kaboul de Khaled Hosseini
Martin : 1Q84 de Haruki Murakami, en japonais...Tu commences tu te dis « je sais pas ce que je lis », à la 200ème page « je comprends encore moins ce que je lis » et à la fin « ah c'est vraiment pas mal », puis tu réfléchis. C'est bien les bouquins qui te retournent l'esprit, j'aime bien quand tu lis et au premier abord tu ne comprends pas, et puis tu réfléchis et tu comprends qu'il voulait dire un truc différent de ce qui est écrit, ça marche pareil quand j'écris les paroles j'aime le côté où tu as quelques chose en plus, du second ou du troisième degré. Tu dois réfléchir sur le texte pour le faire apparaître.

Votre meilleur souvenir de concert quand vous étiez dans le public ?
Martin : Shaka Ponk aux 24h de l'INSA, je ne connaissais pas, ils n'étaient pas connus par rapport à maintenant. C'était juste avant la sortie de leur album, je m'attendais pas à une telle énergie, un tel visuel...
Brice : Muse en 2003 à Vienne, grosse baffe, je me suis mis à la guitare grâce à ça !

Ndlr : Samuel (batterie et machine) n'était pas présent.

Mathilde


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